A BIARRITZ
Pablo de la Higuera, circa 1998
1
Well … Je me trouvais, donc, on s’en souvient, tout en haut du Rocher de la Vierge, à Biarritz. En bas, la mer grondait et le vent soulevait de grosses vagues.
Entonces llegó un guardia y dijo:
-Eh, vous, là-haut ! Qu’est-ce que vous faites ?
-Rien, lui répondis-je. J’y ai été précipité par une vague gigantesque.
-Ah ! fit le policier. Et qu’attendez-vous maintenant pour descendre ?
-Be… J’attends qu’une autre grosse vague me ramène en bas.
El guardia me miró, un poco mosca.
-Vous voulez rigoler ? Dit-il.
-Non.
-Vale. Mais j’avais eu l’impression…
-En plus, je suis mouillé comme une poule. Comme une poule mouillée, bien entendu.
-Eh bien, le Rocher n’est pas un séchoir ! Tous les touristes sont en train de vous prendre en photo ! Ca va lui faire une belle jambe, à Biarritz ! Allez, descendez, et plus vite que ça !
-Je ne peux pas. C’est très haut.
-Sautez !
-C’est trop haut, je vous dis ! Vous n’auriez pas un parachute à me prêter, par hasard ?
2
-Un parachute… Hum… Attendez… je vais voir si j’en ai…
Et il commença à regarder dans ses poches, à la recherche d’un parachute. Puis, en se rendant compte qu’il était en train de faire des bêtises, il piqua une grosse colère et cria :
-M alors ! Comment pourrais-je avoir un parachute dans ma poche ? Faut être étourdi, pour employer un mot gentil !
Moi (là-haut) : Ha ! Ha !
El guardia.- Je vous demande pardon?
Moi : Excusez-moi. C’était pour rire …
El guardia : Bon, ça va…
El guardia se quedó pensativo un buen rato, después se rascó la cabeza como buscando una idea y, cuando la encontró, volvió a mirar a lo alto del Rocher y dijo :
-Dites, faute de parachute, un parapluie, ça vous irait ?
-Moi (toujours là-haut) : S’il est bien gonflé, oui.
El guardia : Comment ça, gonflé ?
Moi : Be oui. Un parapluie gonflé. Sinon, c’est pas la peine.
El guardia (quelque peu fâché, on dirait) : Gonflé… Vous voulez que je vous dise ? Je pense que c’est vous qui êtes gonflé, mon vieux !
3
Mais c’est la mer qui était gonflée. Car, soudain, une énorme vague, une vague aussi gigantesque que celle d’auparavant me prit dans sa crête d’écume et de sel et me jeta loin, très loin, sur la plage de la Côte des Basques.
Avec l’émotion, et aussi à cause d’un coup que j’ai reçu en tombant sur le sable (j’ai failli me casser une côte, et pas celle des Basques, he ! eh!), j’ai perdu connaissance. Quand j’ai retrouvé mes esprits, la marée avait descendu. Alors, comme j’étais toujours très mouillé et j’avais décidé de rentrer à la maison (enfin, presque) en nageant tout au long de la côte, alors, disais-je, je me suis assis sur le sable en attendant le retour de la mer.
Entonces, cuando subió la marea hasta mojarme los pies, apareció el pez.
4
El pez había llegado surfeando sobre la última olita y ya estaba totalmente en la orilla.
Era un extraño pez.
-Hola, dijo.
-Caramba, un pez- me sorprendí yo.
-No veo que es lo que te choca. Los peces vivimos en el mar, no?
-Sí: pero más lejos.
-Es que yo no sé nadar.
-No es posible! No nadas nada?
-Bueno, casi nada.
-Casi nadas?
-No. Digo que no nado casi nada…
-Curieux. Un pez que no sabe nadar, c’est du jamais vu. Y cómo has hecho para llegar hasta aquí?
5
-Je surf.
-Comment ?
-Du surfing, tio. Je me déplace comme ça, sur la crête des vagues.
-Bon, à la rigueur, ça, on peut admettre. Lo que ya me choca más es que un pez francés hable tan bien español.
-No soy un pez francés. Soy un pez. Un pez c’est tout Euh, je veux dire, un point c’est tout.
-Bien, bien… Je vois que tu parles français aussi. -Oui, je suis un pezlyglotte, ha! ha!
-Comment ? Ah, oui, je vois Polyglotte… Pezlyglotte… Ha! ha! Elle est bien bonne, celle-là. (ON S’ESCLAFFE TOUS LES DEUX.)
(ESPACE POUR S’ESCLAFFER)
6
-(Après esclaffage) T’es un drôle de poisson, toi !
-Bof.
-D’ailleurs, où est ton maillot de bain ?
-Quel maillot de bain ?
-Mais le maillot de bain, quôi ! Quand on vient à la plage, on amène son maillot de bain…
-Je n’en ai pas.
-Ah, ça alors! Non seulement tu sais pas nager, mais en plus tu n’as pas de maillot de bain. C’est dingue !
-Sorry… En général, les poissons, ça n’a pas des maillots de bain.
-C’est vrai, mais j’avais presque oublié que tu es un poisson, figure-toi.
Il en était quand même un. La preuve ! Un pêcheur qui se trouvait derrière, dans la plage, enfonça sa canne dans le sable et lança la ligne avec l’intention de l’attraper.
7
-Aïe ! -fis-je, car il s’était trompé et c’est moi qu’il avait attrapé en m’accrochant par le col de la chemise
– Ça va pas, vous? C’est pas moi, le poisson !
-Désolé -s’excusa le pécheur-. C’était l’autre que je voulais… Hum ! Je le voyais déjà, dans le four, tout croustillant tout doré, pour ce soir… Miam ! Miam !
En écoutant cela, le poisson s’enfuit à grandes enjambées… euh… enfin, il s’enfuit, vers l’intérieur de la mer, oubliant qu’il ne savait pas nager.
-Au secours, Au secours ! , cria-t-il, lorsqu’il commença à se noyer.
J’ai nagé le plus vite que j’ai pu à sa rescousse, mais il était partit très loin, en sautillant sur les vagues, et lorsque j’ai réussi à le rejoindre j’étais très fatigué et je commençai à couler, moi aussi.
-Au secours ! Au secours ! Gloup ! Gloup ! – nous exclamons-nous, tous les deux.
8
Entonces, cuando todo parecía perdido, vimos descender sobre nosotros una larga escalera de cuerda.
-Ah, ce doit être l’hélicoptère de sauvetage, dis-je, soulagé.
-Gloup ! fit le poisson.
Mais il s’accrocha à l’échelle et se balança sur la mer, au-dessus des vagues. J’en fis autant, et nous entreprîmes de monter les marches à quatre pattes (enfin, chacun à sa manière), une après l’autre, vers le ciel…
Vers le ciel, justement, car, nous montions l’échelle de plus en plus haut… et au bout il n’y avait toujours pas d’hélicoptère !
9
«Comme c’est bizarre», s’étonna le poisson.
«Tu parles, bizarre», dis-je. «Après les rencontres que j’ai faites aujourd’hui, plus rien ne saurait m’étonner».
Et nous continuâmes à grimper de plus belle. On avait traversé quelques nuages.
Toujours pas d’hélicoptère.
Entonces, cuando ya no teníamos fuerzas para subir más e íbamos a caernos al Océano, vimos el final de aquella maldita escalera.
El final, o sea el principio, era…
10
…un, un gran platillo volante!
Observé antes de entrar que en vez de ruedas para aterrizar, la astronave tenía dientes.
Unos dientes grandísimos.
Se lo comente en voz bajita a mi amigo el pez.
-T’as remarqué les dents assez terribles qu’a la soucoupe, au lieu du train d’atterrissage?
-Ça ne m’a pas échappé -dit-il, passablement inquiet.
Le Commandant de la Soucoupe nous souhaita la bienvenue à bord.
«Bonjour, dit-il. Je vous présente l’équipage… (Sur ce, le dit équipage fit un pas significatif en notre direction, mais fut arrêté dans son élan d’un geste vif par le commandant). Du calme, les enfants, il y en aura pour tout le monde…».
C’est alors que nous nous sommes aperçus de la forme pas normale des gens de l’équipage et du commandant lui-même. Ces extraterrestres ressemblaient curieusement à de grands poissons ou à de grosses fusées, sauf que quand ils ouvraient la bouche… Mon Dieu !
C’étaient des requins ! Nous étions chez les Requins de l’Espace !
11
Le Commandant sourit de toutes ses énormes dents.
« Je vois que vous avez compris, dit-il. Nous venons, en effet, de la Planète Requinquin, qui tombe dans la galaxie d’à côté, second soleil à gauche Nous faisions une petite sortie en week-end, et ayant vu que vous étiez en difficulté, nous avons décidé de vous sauver parce que nous sommes très gentils et que, d’autre part, nous n’avions plus rien à manger…»
Un éclat de rire gourmand de la part de l’équipage accueillit la petite blague du Commandant.
«El pez hay que jugárselo a los chinos», sugirió el copiloto, que era un tiburón que tenía mucha suerte y siempre ganaba a los seises.
«Nada! El que llegue antes se come a los dos!», dijo otro tiburón que era campeón de salto de altura, abalanzándose como un tigre sobre nosotros.
12
«Sauf qui peut !», grité yo, precipitándome escalerilla abajo, aprovechando que se habían olvidado de quitarla.
«Mais qu’est-ce qui leur prend ? Tout le monde veut me bouffer» se plaignit le poisson, en me suivant par l’échelle à toute allure. D’où on se jeta à la mer, dans un grand saut périlleux, au moment où les requinquins s’apprêtaient à nous récupérer.
Fuimos a dar con nuestros huesos (y espinas) a la playa pequeña de Biarritz que hay al lado del Rocher de la Vierge, justement. Subimos a la explanada y, como vi que se acercaba el guardia de antes, cogí el pez de la aleta y lo Ileve a ver el Acuarium.
El Guardia.- Sapristi ! Le type du Rocher a volé un poisson l
Mais nous étions déjà hors de sa portée.
13
«Tickets, please», dijo el portero del Aquarium.
Je regardai mon copain d’un air accablé. Fallait passer au guichet.
«Un ticket», pedi a la taquinera.
-Et celui-là ?, dijo ella señalando el pez. Il ne paye pas ?
-Bien sûr que non, quelle idée. Avez-vous jamais vu un poisson payer dans un aquarium?
-Euh…
-Les poissons, dans les aquariums, ça ne paye pas, c’est connu !
-D’accord -dit la guichetière-. A condition, toutefois, qu’il soit dedans.
-Comment ça, dedans?
-Be oui. Dans les cages de verre, comme tout le monde.
-Tout le monde est dans des cages de verre ici ?, fis-je semblant de ne pas comprendre.
-Comme tous les autres poissons, je veux dire… Ils sont derrière les vitres et ils nagent.
-Celui-ci, il peut pas -expliquai-je.
-Pourquoi donc ? s’enquit la guichetière.
-Parce qu’il ne sait pas nager.
-Ah, ça alors ! s’étonna la dame. C’est un poisson et il ne sait pas nager ! Comment fait-il alors ?
-Il surnage…
-Ah… -dit-elle sans être tout à fait sûre de comprendre. Dans ces conditions…
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-Voilà. Vu les circonstances, il devrait payer moitié prix…
-Quelles circonstances ?
-La circonstance d’être un poisson, notamment.
-Mais il ne nage pas ! -revint à la charge la guichetière.
-Evidemment. Puisque je vous dis qu‘il surnage.
-Mais…
-S’il nageait, il payerait le prix entier. Mais comme il surnage, il paye moitié prix. Logique, non ?
– Euh… Tout à fait… -balbutia la pauvre femme, qui ne savait plus ce qu’elle disait.
-Elle est difficile, celle-là ! -chuchotai-je dans l’oreille de mon petit copain, en lui donnant son demi-ticket.
Puis, en me retournant vers le guichet :
-Pardon, j’oubliais… Est-ce qu’on a le droit de voir le repas des phoques ?
-Bien entendu, dit-elle. Mais je conseille votre ami de se tenir plutôt à distance. Le poisson frais, ILS ADORENT…
15
Le savant avertissement de la préposée au guichet ne servit à rien. Déjà la visite aux différents compartiments heureusement étanches où évoluaient les poissons avait été assez agitée, les locataires aquatiques n’appréciant pas trop qu’un collègue se promène tranquillement de la main d’un monsieur devant leur nez. On dirait qu’il les narguait, en plus… Il y eut de vives protestations derrière les vitres. La tortue géante se montra particulièrement menaçante.
Il y avait aussi un compartiment Requins, mais on a passé outre. Non, merci !
Mais le pire fut, comme il fallait s’y attendre, la visite aux phoques. Mi amigo el pez, que es un perfecto insensato, no pudo evitar la tentación de zambullirse en el estanque, histoire de surfer un poco. Vi con espanto como aterrizaba sobre el lomo de una enorme foca y que se sumergía con ella. Cuando volvió a la superficie y se dio cuenta del peligro que corría pego un salto enorme y se refugió en mis brazos.
Menos mal que, además de surfeur, era saltarín.
16
Con el susto bajamos las escaleras del Aquarium corriendo y no paramos hasta llegar a la piscina de Biarritz. Decidimos que sería relajante darse un bañito en el « petit bain ».
-Tickets, please.
-Un ticket, s’il vous plaît.
-Non, ça ne me plaît pas. Il vous en faut deux : un pour vous et un autre pour monsieur, euh… je veux dire pour le poisson.
D’un ton fatigué, je recommençai mon histoire.
-Les poissons, dans les piscines, ça ne paye pas.
-Ici, c’est le samedi après-midi que c’est gratuit pour les poissons. Les autres jours, il faut payer.
Je fis semblant de ne pas entendre cette énormité et poursuivis ma cantilène.
17
-Bon, étant donné les circonstances, il pourrait payer moitié prix au moins.
-Quelles circonstances ?
-La circonstance qu’il est un poisson, notamment.
-Aucun rapport.
-Ah si ! Les poissons, ça se trouve comme le poisson dans l’eau, vous connaissez le dicton.
-Vous m’embrouillez. A-t-il son maillot de bain, au moins ?
-Euh… non. Pas vraiment…
-Ah, ça alors, on vient à la piscine sans maillot de bain, on veut payer moitié prix…
-Les poissons, vous savez… Et puis, il ira seulement dans le petit bain…
-Bon, conclut la femme du guichet. Puisque c’est dans le petit bain, ça va… Mais absolument interdit d’aller dans le grand !
-Vale, madame la guichetière, dis-je sans trop de conviction.
-Tu parles, Charles !- me cligna l’œil mon copain, en prenant congé de la dame.
Mais alors qu’on se régalait déjà devant la perspective d’une après-midi très relax dans la piscine, j’entendis une voix qui m’était connue en train de demander à la guichetière :
El Guardia.- Vous n’auriez pas vu, par hasard, un individu mouillé se promenant un poisson à la main ?
18
Il a bien fallu, pour lui échapper, maillot de bain ou pas, plonger dans le grain bain.
On y resta très longtemps. Sous l’eau, notamment.
Et c’est ainsi comment mon ami le poisson surfeur apprit à nager.
Car son problème, c’est que quand il était petit, il n’allait pas sous l’eau parce qu’il avait peur de se noyer. Alors, il surfait…
19
Lorsque nous sortîmes enfin de l’eau, El Guardia n’était plus là. Mi amigo el pez y yo nos despedimos y él nadó muy contento, mar adentro. Il était content de pouvoir enfin nager comme les autres poissons.
Mais il aimait surfer de temps à autre, pour autant. Et par les beaux jours, quand il savait que j’étais en train de me baigner dans la plage La Milady, il venait toujours en surfant sur les dernières vagues pour bavarder avec moi. On rigolait bien ensemble.
Tout en faisant attention à ce que le fichu pêcheur ne s’approche trop pour l’attraper…
FIN
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